Les patients moins nantis perdraient du poids plus difficilement
La publicité minceur cible les consommateurs qui sont aptes et disposés à payer pour des régimes alimentaires, des repas spéciaux ou un abonnement à un centre de conditionnement physique. Or, ce sont ceux qui vivent sous le seuil de la pauvreté qui sont les plus susceptibles d’être en surpoids ou obèses. Cela dit, le manque d’argent n’est pas le seul facteur en cause.
En effet, selon une nouvelle étude de l’Université Concordia parue dans l’American Journal of Preventive Medicine, les personnes qui en arrachent le plus financièrement sont moins susceptibles que les très bien nantis de lutter efficacement contre le surpoids en faisant de l’exercice, en buvant de l’eau ou en diminuant leur consommation de matières grasses ou de sucreries.
« Les recommandations nationales sur les moyens à prendre pour perdre du poids sont peut-être trop éloignées des préoccupations des gens qui peinent à joindre les deux bouts », explique Lisa Kakinami, chercheuse au Centre PERFORM de Concordia et auteure principale de l’étude.
Plutôt que de changer leurs habitudes alimentaires ou de faire régulièrement de l’exercice, les personnes à faible revenu ont tendance à choisir la facilité et à prendre des pilules amaigrissantes. Elles préfèrent même ces produits – qui peuvent pourtant avoir l’effet inverse à long terme – à d’autres démarches pour ainsi dire gratuites.
« Les ménages aux revenus les plus élevés ont davantage tendance à réduire leur apport en gras et en sucre, à faire de l’exercice ou à boire beaucoup d’eau que ceux dont le revenu est faible », affirme la chercheuse Kakinami, qui est aussi professeure au Département de mathématiques et de statistique de Concordia.
Si ces stratégies sont assez bien connues des gens en général, leur application demeure limitée, surtout chez les personnes qui vivent sous le seuil de la pauvreté ou près de celui-ci.
« Dans l’ensemble, nos résultats semblent indiquer que la préférence va aux méthodes qui procurent le sentiment d’un résultat immédiat, mais qui ne fonctionnent pas à long terme et finissent par être nocives », ajoute la chercheuse.
Les jeunes américains élevés dans des ménages à faible revenu étaient très enclins à employer des stratégies contraires aux recommandations nationales. En effet, ils étaient moins portés à faire de l’exercice que leurs pairs des familles les mieux nanties, mais plus susceptibles qu’eux de jeûner ou de sauter des repas.
L’analyse des données recueillies auprès des quelque 8 800 participants à la National Health and Nutrition Examination Study fait ressortir des lacunes persistantes dans les messages émis à la population. Or, faut-il rappeler que la recherche à tous crins des solutions les plus rapides n’a nullement réduit les taux d’obésité?
Quant à ceux qui n’ont pas les moyens de s’offrir les méthodes de pointe en matière de gestion de l’alimentation et de la condition physique, ils risquent d’en subir de graves conséquences.
De toute évidence, la quantité d’études menées sur l’obésité ne suffit pas pour renverser la tendance. Lisa Kakinami compte parmi les universitaires qui veulent que leur travail entraîne un changement en profondeur de la santé publique.
« Toutes les études sur le surpoids se brouillent sans doute dans l’esprit des gens, avance-t-elle. C’est peut-être le moment de prendre du recul et d’évaluer ce que les gens savent et comprennent de l’obésité et de la perte de poids. »