Le traitement de l’ostéoporose serait utile contre le cancer du sein
Une nouvelle approche thérapeutique pour réduire le risque de complications osseuses métastatiques associées au cancer du sein pourrait bientôt voir le jour.
Selon les résultats d’une étude menée par une équipe de l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR-CUSM), un médicament utilisé pour traiter la détérioration du tissu osseux chez les femmes ménopausées pourrait aussi ralentir la formation de métastases osseuses dues au cancer du sein [1].
L’étude, publiée aujourd’hui dans le Journal of the National Cancer Institute (JNCI), est parmi les premières à établir un lien entre l’usage des biophosphonates (un médicament couramment utilisé pour traiter l’ostéoporose) et un meilleur taux de survie chez les femmes atteintes du cancer du sein.
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« Les métastases osseuses se développent chez au moins 70 % des femmes qui décèdent du cancer du sein », explique un des coauteurs principaux de l’étude, Dr Richard Kremer, directeur de l’unité des tissus osseux et des minéraux au CUSM et professeur à la Faculté de médecine de l’Université McGill.
« Les métastases causent énormément de douleur et menacent la survie de la patiente. Prévenir leur formation pourrait nous permettre de sauver la vie d’un nombre important de patientes. »
Réduire le risque métastatique de moitié
Le Dr Kremer et la coauteure principale de l’étude, la Dre Nancy Mayo, ont collaboré avec d’autres collègues dans le but d’évaluer des données recueillies auprès de plus de 21 000 femmes diagnostiquées d’un cancer du sein.
Le lien entre l’utilisation des biophosphonates par voie orale et le développement des métastases osseuses suivant un diagnostic de cancer du sein a été observé chez deux groupes de femmes : celles atteintes d’un cancer de stade précoce, donc localisé, et celles dont le cancer s’est étendu aux ganglions lymphatiques.
Les résultats ont démontré que les femmes atteintes d’un cancer du sein au stade précoce, ayant pris des bisphosphonates par voie orale, avant ou après leur diagnostic de cancer, étaient moins à risque de développer des métastases osseuses.
De plus, l’étude a également démontré que le risque de développer des métastases osseuses chez les femmes atteintes d’un cancer plus avancé, ayant elle aussi utilisé des bisphosphonates oraux après leur diagnostic, a chuté de façon significative.
Les chercheurs ont établi une relation dose-effet par rapport à l’usage des bisphosphonates oraux chez les femmes atteintes d’un cancer du sein localisé : plus la période d’utilisation des bisphosphonates est prolongée, plus le taux de formation des métastases osseuses diminue.
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« Notre étude est novatrice dans le sens où elle inclut des femmes ménopausées chez qui le taux de renouvellement des cellules osseuses était plus élevé à cause de l’ostéoporose », explique Dr Kremer.
« Selon nous, ce processus crée un environnement favorable à la croissance de cellules tumorales et au développement ultérieur de métastases. Nous savons que les bisphosphonates fonctionnent en ralentissant le taux de renouvellement des cellules osseuses. Il devient alors plus difficile pour les cellules tumorales de s’établir dans l’os, ce qui pourrait expliquer pourquoi nous avons constaté une aussi grande réduction dans le développement des métastases. »
Études cliniques requises
« Un lien entre l’usage des bisphosphonates et un meilleur taux de survie a également été observé, chose qui mérite une recherche plus approfondie », conclut Dre Mayo, chercheuse à l’IR-CUSM et professeure James McGill à la Faculté de médecine de l’École de physiothérapie et d’ergothérapie de l’Université McGill.
« Notre étude était de nature épidémiologique, impliquant un grand nombre de femmes, ce qui renforce l’importance de nos résultats. Toutefois, des études cliniques interventionnelles doivent être menées avant que les résultats puissent être appliqués et que des pratiques cliniques standards et des lignes directrices soient établies. »
Références
- L'article Effects of oral bisphosphonates for osteoporosis on development of skeletal metastases in women with breast cancer: Results from a pharmaco-epidemiological study a été coécrit par Richard Kremer, département de Médecine, Centre universitaire de santé McGill (CUSM), Montréal, QC; Bruno Gagnon, division d'Épidémiologie clinique, CUSM, Montréal, QC et Centre de recherche sur le cancer, Université Laval, Québec, QC; Ari N. Meguerditchian, département de Chirurgie, CUSM, Montréal, QC; Lyne Nadeau, division d'Épidémiologie clinique, CUSM, Montréal, QC; et Nancy Mayo, département de Médecine et division d'Épidémiologie clinique, CUSM, Montréal, QC. ↩