Ministre de la santé : une influence tentaculaire
Supprimer des postes de cadres, abolir des conseils d’administration et éliminer les agences régionales de santé pour les remplacer par des Centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS).
Des mesures à implémenter d’ici les deux prochaines années, selon Dr. Géatan Barrette, qui présentait son projet de loi 10, il y a quelques heures.
« Fini les obstacles administratifs, fini les dossiers non partagés, fini les multiples cartes d’hôpital, fini les guerres de clochers », a déclamé le ministre Barrette, signifiant la fin certaine d’une ère organisationnelle.
En point de presse, l’ex-président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) affirmait sans broncher que le projet de loi 10 permettrait de «favoriser et simplifier l’accès aux services pour la population, contribuer à l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, et accroître l’efficience et l’efficacité du réseau».
Centres intégrés de santé et de services sociaux
La dénomination n’est peut-être pas encore naturelle, mais il faudra vraisemblablement s’y faire, puisque ce sont des Centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS) qui succèderont aux défuntes agences régionales de santé et services sociaux.
À raison d’une structure du genre par région, sauf à Montréal qui en comptera quatre, elle seront sous l’autorité directe du MSSS.Le ministre libéral assure également ces coupes ne se feront pas sentir au niveau des usagers, ni du personnel traitant.
Assainir les finances publiques
L’objectif avoué étant de générer des économies récurrentes de l’ordre de 220 millions sur une base annuelle. La décision la plus cruciale est l’élimination complète du palier que représentaient les agences régionales de santé et services sociaux.
Les structures organisationnelles en santé seront revues pour n’en laisser qu’une trentaine. À coup de fusions, abolitions et restructurations, c’est 182 organismes qui seront affectés :
- Hôpitaux et centres de soins de longue durée (68)
- CSSS (94)
- Centres jeunesse (16)
- Établissements nordiques aux missions multiples (4)
À en croire la stratégie libérale, la mise à pied massive de cadres – 1300 d’entre eux seront appelés à quitter leur poste – et l’abolition des 18 agences régionales de santé sont des passages obligés pour assainir les finances publiques.
Le fer de lance d’une restructuration libérale en santé passe également par des coupes administratives, puisque 180 conseils d’administration seront éliminés à travers une myriade d’institutions dans le réseau : CSSS, centres de réadaptation, organisation, etc.
VOIR AUSSI : Rapport de l’IGOPP, une gouvernance axée sur le patient
Il y a quelques semaines, Physiotherapeute.com faisait état des recommandations d’un rapport de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP). Ce dernier recommandait de décentraliser le système de santé et abolir 18 agences régionales de santé – elles seraient remplacées par 10 régions de services – pour offrir des soins de santé plus efficaces et axés sur le patient.
Un super-ministère
Le Ministère de la Santé et des Services sociaux mettrait la main sur des pouvoirs importants. Que ce soit la nomination des membres du conseil d’administration des organismes ou la sélection des présidents-directeurs généraux des établissements en santé, c’est au ministre que reviendra la décision.
La prise de pouvoir – tentaculaire, il va sans dire – se réalise également par l’acquisition d’un nouveau droit, par le MSSS : «Le pouvoir de prescrire des règles relatives à la structure organisationnelle de leurs directions et celui d’intervenir auprès de la direction générale si des gestes incompatibles avec les règles de saine gestion sont posés»
Cette dernière précision rappelle la mise en tutelle de certains établissements de santé, dont la gestion catastrophique avait incité le gouvernement à s’ingérer directement au sein des établissements.
VOIR AUSSI : La protectrice du citoyen redoute des injustices sociales
La semaine dernière, les compressions budgétaires, annoncées par le gouvernement Couillard, laissaient présager des impacts considérables dans l’offre de services publics – surtout dans le secteur des soins de santé et services sociaux – selon Raymonde Saint-Germain, protectrice du citoyen.
En marge du dépôt de son rapport annuel, elle dénonçait des craintes importantes en regard des citoyens le plus vulnérables et craint qu’ils ne fassent les frais de la vague de compression qui déferlera bientôt sur la province.