Jintronix : De la paralysie à l’innovation
En plein vol New York-Paris, le père de Justin Tan est victime d’un accident vasculaire cérébral touchant son hémisphère gauche. Gynécologue au Centre universitaire de santé McGill (CUSM), il perd le contrôle de son hémicorps droit, entièrement paralysé. On lui exprime clairement une impossibilité de retrouver un patron de marche normale. [1]
Une réadaptation aux nombreux obstacles
Justin assiste aux défis rencontrés par son père. Étudiant en génie biomédical, il observe les obstacles rencontrés au cours de la réadaptation physique, notamment le manque de compliance aux exercices, de par leur niveau d’interaction limité. Il commence à imaginer une solution permettant une réadaptation interactive, engageante et dynamique. À l’aide d’une console de jeu, il crée une application amenant les patients à réaliser des mouvements à l’épaule au pointant un objet sur un écran.
Après ses études en génie, Justin rentre à Montréal et se décide à poursuivre le projet. Il s’adjoint rapidement des services d’amis pour lancer une entreprise. Ils oeuvrent avec des membres de l’École de physiothérapie et ergothérapie de l’Université McGill pour peaufiner leur système de réadaptation virtuelle.
Le germe de cette idée est à la base de la création de Jintronix, une entreprise montréalaise fondée en 2010 par Justin. Aujourd’hui, elle offre une plateforme de réadaptation virtuelle propulsée par une console de jeu Microsoft Kinect, dotée d’un système de détection de mouvement.
« En travaillant avec des cliniciens et des chercheurs de l’Université McGill, nous sommes parvenus à utiliser le jeu vidéo comme moyen d’offrir une réadaptation neurologique avec une observance rehaussée. Notre objectif n’est pas de remplacer la physiothérapie, mais bien d’offrir un outil qui peut renforcer les soins. »
C’est en ces mots que Daniel Schacter, président de l’entreprise, qualifie l’objectif de son équipe. En entrevue avec Physiotherapeute.com, entre un vol Montréal-Seattle, il ne démord pas d’enthousiasme pour ce projet.
Révolutionner la réadaptation, rien de moins
À ce jour, Jintronix offre trois gammes de produits qui visent divers acteurs du continuum de la réadaptation : patients, physiothérapeutes et cliniques. Cependant, ce n’est pas une technologie à accès direct. Une prescription est requise pour les patients souhaitant en faire une utilisation à domicile.
M. Schacter affirme : « Nous sommes présents dans quelques centres de physiothérapie au Québec et nous recherchons activement des milieux cliniques prêts à collaborer avec nous. Déjà, l’Hôpital de réadaptation Villa Medica fait appel à notre technologie. »
Forte d’une injection en capital de 1,3 million de $ [2], la jeune start-up est perçue comme une des plus innovantes par la prestigieuse revue Forbes. [3] Force est d’admettre qu’elle a su charmer les investisseurs.
Phase clinique amorcée
Déjà approuvée par Santé Canada, [4], le système de réadaptation a reçu l’approbation de la Food and Drug Administration (FDA) aux États-Unis [5]. La phase clinique du développement de l’entreprise s’amorce.
« Évidemment, les études cliniques requièrent temps et ressources. Nous en sommes là actuellement. Jintronix travaille avec Dre Dahlia Kairy de l’École de réadaptation de l’Université de Montréal. Grâce à une subvention de la Fondation des maladies du coeur et de l’AVC, nous étudierons l’impact de la téléréadaptation au sein d’une cohorte de 66 patients. » [6]
À moyen terme, Daniel Schacter pense à diversifier les plateformes sur lesquelles sera offerte la technologie Jintronix. Mais pour réaliser son souhait, la collaboration des milieux cliniques est essentielle.
« Nous sommes une entreprise montréalaise et notre coeur est sans contredit au Québec. Pourtant, nos clients sont majoritairement américains. Je pense que d’ici à deux ans, la téléréadaptation sera moins marginale et nous aspirons à la voir intégrée au continuum de soins. »